dimanche 19 février 2023

Alerte au vivant !

Alerte au vivant !

Les temps à venir ne sont pas propices

Une aube létale pointe à l’horizon de notre monde

L’abondance du vivant ne se renouvelle plus comme avant

Les cycles de vie sont perturbés, la grande matrice

Engendrant recyclant restaurant inlassablement

Les puissants équilibres qui nous régissent

Se détraque sous les coups de butoir d’une humanité déchainée

Les courants marins ne tempèrent plus l’alternance des saisons

Le magnétisme des pôles s’inverse les flux migratoires s’affolent

Des hécatombes animales s’échouent en marées rémanentes

Les bébés mammifères naissent avec dans leurs corps

du plastique transmis par le placenta de leurs mères

Les amphibiens subissent des bouleversements hormonaux

Les éléments dégorgent leurs trop plein de pollution dans les entrailles de la terre

Le monde devient silencieux le sauvage disparait les espèces meurent

Les grandes forêts régulatrices du climat se réduisent à vue d’œil

La planète se réchauffe les pôles fondent les mers montent

Bientôt les humains ne pourront même plus s’entretuer tranquillement !

 

Le monde tel que nous le connaissons doit trouver le moyen de se réformer

Radicalement – dans les plus brefs délais – s’il veut survivre

Alerte ! Alerte ! Alerte !

 

Bien sûr, je connais déjà ce que tu vas répondre

- Toi la Terre-Mère, toi l’organisme-monde

Toi que certains ont choisi d’appeler Gaïa -

Toi qui te débats comme tu peux contre cette lèpre

qui s’infiltre en toi pour spolier tes moindres ressources

Dans une effrayante course entre le profit et la mort - 

Cohérente avec les lois d’airain que tu instaures

et qui te régissent – pour toi, l’ éternellement régénérée,

Il n’existe qu’une seule solution :

Réduire drastiquement la menace humaine, par tous les moyens

- bactériologique, génétique, météorologique – faire

Revenir à toute force cette espèce invasive à la portion congrue

Qui lui est due – nécessairement régulée par toutes les autres

Selon la loi irrévocable régissant la grande tapisserie vivante…

 

Mais moi qui – à mon corps défendant – fait partie de l’espèce invasive

Et contribue – que je le veuille ou non – à son action mortifère

Comment puis-je accepter d’avoir à disparaître

Pour payer la folie inconséquente des membres de mon espèce ?

C’est des miens dont il s’agit – c’est de moi et des autres

C’est de notre monde à nous - Comment trouver une relation

Harmonieuse avec soi-même et l’univers

Lorsque l’équilibre des contraires est bouleversé à ce point ?

 

Pourtant, je ne te suis pas extérieur – je ne suis pas un allien

Fraîchement débarqué d’une lointaine planète conquérante

Je fais partie de toi – je suis moi aussi une parcelle du vivant

Mon existence infime contribue comme les autres aux grands flux

Qui nous portent, nous nourrissent et nous régénèrent

Mon existence infime participe au maintien du vivant

Au même titre que celle d’une molécule d’eau, d’une graminée

D’un coléoptère d’une motte de terre ou d’un courant marin

- alors, puisqu’il n’y a pas « eux » et « nous » - puisqu’il n’y a pas

« Je-seul » et « ça-le-reste » - puisque nous sommes tous en commun

N’y aurait-il pas quelque once de sagesse

Scellée au plus profond de notre mémoire ancestrale – à nous

Autres, les animaux humains – qui puisse enfin nous inciter

A un comportement plus raisonnable – plus sage –

Plus « humain » ?

 

 – Hum… La Sagesse – la Raison –

L’Humanité ? Ce sont des notions que tu ne connais guère

Toi la Grande Gésine accouchant sans fin d’une nouvelle

Génération de toi-même, toi l’éternelle, toi la force

Biologiquement lovée au cœur de la faiblesse

Emondant sans cesse le vivant pour que le vivant perdure

- La sagesse ? Les humains en parlent beaucoup, en effet

Depuis ce qu’ils considèrent comme la nuit des temps

Et qui n’est au fond que l’éclat de leur soudaine irruption

Hors de la gangue du monde dont ils se sont extraits – tout récemment

Lorsqu’ils ont voulu se croire différents – supérieurs – sages ?

La Sagesse ? Le bouddha leur a montré la voie

Il y a bientôt 2 600 ans – mais qu’en est-il advenu depuis ?

Jésus aussi à sa manière, sans doute moins radicale

Puis tant d’autres prophètes et prophétesses déferlant

Sur les nuques serviles de millions de fidèles

- mais à quoi cela a-t-il abouti ? A quoi ont servies

Toutes les divinités de tous les panthéons humains

En matière de sagesse ? A rien – ou presque…

Alors, espérer que les humains se montrent enfin sages

Là où les siècles passés n’y ont pas suffi ?

Qui peut encore raisonnablement y croire ?

 

Je ne vois pas d’autre solution à ce dilemme

Que de fermer les yeux en se laissant flotter

A la surface de la grande étendue d’eau qui nous porte

D’affûter tous nos sens à l’écoute de la grande matrice

D’essayer de la seconder dans ses efforts pour combattre

Le mal que nous représentons pour elle

De résister à la tentation de rupture en nous mettant à l’unisson

Des forces de vie qui nous brassent nous inondent et nous dispersent

D’être encore plus à l’écoute de la vie qui transite

A travers nous – de ne faire plus qu’un avec elle

D’inciter notre cœur à se relier aux moindres êtres vivants

Frayant dans nos parages – d’ouvrir les portes de notre esprit

Toutes grandes aux bouleversements des météores…

De mêler nos doigts tâtonnants aux racines et aux larves

De germer conjointement avec elles, de nous hybrider à tout va

De propager aux plus prêts de soi, dans l’orée minuscule

Qui nous caractérise en tant qu’individu - de pousser

A ses plus infimes extrémités le mélange du vivant.

 

(ce texte-poème a été écrit pour être lu à haute voix. Essayez !)

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