mercredi 28 août 2024

Sur une collaboration littéraire.

Hymne composé en collaboration avec Antonin (9 ans bientôt dix). Nous avons échangés nos idées sur le sujet et j’ai ensuite mis le poème en forme.

Comme c’est bien d’avoir un corps !

Parce qu'avec un corps on peut se brosser les dents
se peigner et mettre ses chaussettes sans se tromper
C’est bien d’avoir un corps comme ça on peut apprendre
à faire des figures de BMX c’est bien d’avoir un corps
Parce qu’on peut mettre les nouveaux habits de la rentrée
dans lesquels on se sent bien – si l’on n’avait pas de corps
il n’y aurais pas d’habits à porter – ou alors ce sont d’autres gens
qui les porteraient à notre place ce serait dommage non ?

C’est bien d’avoir un corps parce que sans corps on ne pourrait pas
chanter manger et avoir sommeil – des trucs qui plaisent en général
Il faut une bouche pour chanter ou manger – et une (glotte?)
pour faire des sons – quand on a pas de corps on n’a pas de glotte
c’est un fait avéré - et pour dormir il faut tout un corps
lourd, si lourd - cela se fait tout seul – ou bien cela nécessite
l’intervention d’un fakir avec ses yeux magiques - « Dormez je le veux ! »

S’endormir c’est comme si on devenait une pierre lourde qui tombe
Quant à dormir il n’y a plus personne pour dire ce que c’est
C’est quand même là (où gît) la véritable magie, non ?
En tout cas il faut bel et bien un corps pour se réveiller
Si on se réveillait pas c’est pour le coup qu’on serait mort !
Les morts n’ont pas de corps. Est-ce parce qu’ils sont morts ?
Difficile de se faire un avis tranché sur la question

Lorsqu’on se réveille on baille on fait des bruits on s’étire
Tout cela est merveilleux comme les chats il faut un corps
pour cela. Le corps ça bouge, ça se dépense, ça se fatigue
Même les odeurs du corps ça peut ne pas sentir très bon
mais c’est bien quand même – et lorsqu’on utilise du savon
(surtout du bon savon) c’est parfumé c’est bien agréable
Sans corps on pourrait pas péter même si c’est pas poli de le faire
ni se gratter l'intérieur de l'oreille ni s'ôter les crottes d’yeux

Pour se parler il faut un corps pour rire il faut un corps
pour se prendre dans les bras il en faut même deux !
Pour se faire des bisous dans le cou ou se donner des coups de pieds
Pour avoir mal il faut un corps – personne n’aime ça vraiment
Mais en même temps c’est bien d’avoir (un peu) mal
C’est quelque chose de très spécial qui nous laisse pas tomber
Les vieilles douleurs sont nos plus fidèles compagnes

Si t’as un corps quelqu’un peut te dessiner te faire
deux yeux une bouche un nez ou si c'est pas ressemblant
prendre une photo où on reconnait bien Antonin
Pour désigner quelqu’un il faut un doigt qui dise « c’est toi »
Si on n’a pas de corps personne ne pourrait faire ça
nous dire « tu » - on serait alors comme un mouchoir
sans personne pour se moucher dedans – ça sert à quoi ?

Grâce au corps on a des dents – une bouche où on peut mettre
des choses dedans (essentiellement des aliments) – et des doigts
pour toucher et des pieds pour éclabousser dans l’eau
Et évidemment grâce au corps on peut nager ouvrir les yeux
sous l’eau avoir les oreilles bouchés faire pipi quand on a envie
Même dans l’eau c’est possible – ce qui est un avantage certain

En résumé le corps c’est le scotch qui permets de coller n’importe quoi
à soi - sans lui ni sensation ni perception ni conscience - rien
C’est comme si on se retournait et qu’on croyait qu’il y avait quelqu’un
mais qu’en fait il y avait personne – sauf qu’en fait ce serait nous
qui serait pas là et tout le reste qui serait là et qui se dirait :
Bah tiens il y a personne ici ? Ben non, puisqu’il n’y a pas de corps !

lundi 26 août 2024

Sur un orage d’été.

J’avais tout installé avant que l’orage n’éclate : les tuyaux dérivatifs de la gouttière, mis bout à bout, devaient déverser l’eau de pluie dans la réserve, surélevée sur un socle et décalée du regard d’évacuation qui sinon risquait d’être noyé… Mais, patatras ! L’orage éclate avec une virulence telle qu’il démantèle l’installation bringuebalante. Les tuyaux se décrochent et vont rouler dans l’herbe. La cascade d’eau de pluie inonde le terre-plein. Vaguement protégé par un coupe-vent et une casquette – tous les deux si rapidement détrempés qu’ils ont l’air de fondre sur place – je m'efforce de remonter l’échafaudage de tuyaux, luttant contre le déluge se déversant de la gouttière en un flot dru dont la force me tord la main. Je patauge, je peste, je vitupère. Mes lunettes ruisselantes m’empêchent de voir quoi ce soit. Je vais les déposer dans la maison, essorant instantanément une petite flaque d’eau sur le carrelage, puis ressors en oubliant mon couvre-chef. De toute façon je suis déjà trempé jusqu’aux os, alors quelle importance ? Je dois travailler les bras en l’air, le flux ruisselle à l’intérieur de mes manches. Pour un peu je me mettrais nu, pour mieux jouir encore de cette pluie extraordinairement tiède, vive et violente, qui se fracasse sur le monde avec la force de frappe des hallebardes. Toute l’installation dégringole à nouveau - moi en prime, glissant sur l’herbe imbibée et manquant de m’étaler les quatre fers en l’air. Comme cette colère brouillonne - comme cette panique pathétique - comme ce mélange de tout et n’importe quoi me conviennent ! Quelle joyeuse dinguerie, cette insignifiance dans le grand tout !

mercredi 14 août 2024

Sur l’amour

J’ai aimé éperdument des personnes

qui m’appréciaient

        sans que je leur sois indispensable

j’ai inspiré de l’amour à des personnes

pour qui j'éprouvais de la tendresse

        mitigée d'indifférence

qu’est-ce que ceci ?

des doigts tâtonnant dans le noir

prenant pour un dragon

ce qui n’a ni forme ni nom

        reflets de la lune

        dans un cœur pur

Sur une matinée en ville  Je me prosterne devant l'épaisse couche de neige qui recouvre ma voiture ce matin, je me prosterne devant le j...